Une usine de souliers à Florence décide de fabriquer des chaussures à bout rond. Elle va donc équiper toutes ses machines avec des emporte-pièces de cette forme, ce qui va représenter un investissement économique. Elle ne pourra donc plus produire de chaussures à bouts pointus le temps qu’elle amortisse le coût de cette transformation. Il en va ainsi pour tous les objets manufacturés, des voitures aux robinets, dans toute l’industrie plastique, sidérurgique, utilitaire ou décorative. Leurs formes, leurs matières et leurs couleurs sont déterminés par des contraintes industrielles. Fortuitement, ces contraintes vont impacter nos vies.

L’esthétique de nos existences est conditionnée par cet ensemble de signes qui forment un réseau de balises chromatiques, matérielles et architecturales déterminantes pour notre quotidien. Cette esthétique a une puissante influence sur les conditions de nos existences et la formation de notre culture populaire. Elle détermine son cadre, sa norme.

L’une des manifestations exemplaires de cette norme est l’appartement témoin, vitrine architecturale et mobilière qui offre une vision normée de la vie quotidienne, un style de vie censé incarner une vie attractive et accessible. Ce n’est pas seulement la structure architecturale qui importe ici, mais tout l’environnement décoratif et mobilier installé afin de valoriser commercialement l’achat d’un appartement. Cette valorisation est déterminée par des normes industrielles. La problématique de cette norme est au cœur de cette exposition qui  propose une installation immersive, inspirée par les appartements témoins qui symbolisent des modèles existentiels.

Partant de ce constat – l’existence d’injonctions formelles qui dominent et génèrent des modèles existentiels dans nos vies, Luca Grimaldi (1985), peintre romain, americano-italien, présentera en juin 2021 l’installation d’un appartement témoin. Ses huiles représentent des intérieurs publics, des salles de bains, des vitrines réfrigérées, des stores, des vêtements, des balcons, des étalages de revues et d’autres objets de la vie quotidienne, motifs si courants et si présents dans nos environnements que notre œil ne les remarque plus ou tout au moins n’en calcule pas l’esthétique.

Il représente le monde commercial tel qu’il s’exprime dans ses couleurs, ses motifs, ses constructions architecturales et décoratives, dans une esthétique qui semble fortuite, non concertée mais dépendante de facteurs communs universels. C’est un monde dont les couleurs, les matières et les formes sont déterminées par des règles économiques, établies par des habitudes de marketing, comme l’expression plastique du monde capitaliste.

En révélant ces normes, Luca Grimaldi nous permet de jeter un regard sur ce que nous ne voyons pas et qui pourtant nous entoure, sur tous les éléments qui forment le cadre esthétique de nos quotidiens, la norme d’une esthétique subie.

Estetica capitalista -
Estetica capitalista -
Estetica capitalista -
Estetica capitalista -
Estetica capitalista -

Luca Grimaldi,nato in 1985, é un pittore Americo-Italianoche vive a Roma. 

Azzedine Saleck, nato in 1985, è un poeta e un artista che vive tra Parigi e Roma.